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Activité de conduite/repos : la Cour de cassation apporte des nuances sur la répartition des temps

23 octobre 2024 Juridique et Social
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Dans un arrêt du 9 octobre 2024, la chambre sociale de la Cour de cassation a apporté plusieurs éclairages relatifs aux modalités d’exécution de l’activité de conduite et au temps de repos.

Les circonstances du litige

 

En l’espèce, un salarié a été engagé en qualité de conducteur routier poids lourds, le 18 juin 2008 par une entreprise de transports routiers. À compter du mois de juin 2015, plusieurs sanctions disciplinaires lui ont été notifiées.

 

Le salarié a été licencié pour faute grave le 16 janvier 2018. Il a alors saisi la juridiction prud'homale pour obtenir :

  • l'annulation des sanctions disciplinaires dont il avait fait l'objet ;
  • réparation de son préjudice né de ce qu’il considérait être un harcèlement moral ;
  • la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes au titre du licenciement.

La solution de la Cour de cassation

 

L’arrêt de la Cour de cassation est un arrêt de « cassation partielle », ce qui signifie que la décision de la Cour d’appel a été partiellement annulée et partiellement confirmée selon les points considérés.

 

a- Elle casse la position de la Cour d’appel concernant le rejet de la demande du salarié portant l’existence d’un harcèlement moral (qui devra être réexaminée ultérieurement).

 

b- Elle annule également la position de la Cour d’appel qui avait validé des sanctions disciplinaires fondées sur l’impossibilité pour l’employeur de joindre le salarié pendant son temps de repos : la Cour de cassation réaffirme que le fait de n'avoir pu être joint en dehors des horaires de travail sur son téléphone portable personnel est dépourvu de caractère fautif et ne permet donc pas de justifier une sanction disciplinaire.

 

c- Mais la Cour de cassation estime que la question du harcèlement moral est décorrélée de celle de la rupture du contrat de travail en l’espèce, et n’en déduit pas une nullité du licenciement.

 

La Haute Juridiction a donc analysé en droit le licenciement pour faute grave : elle l’a validé en énonçant : « Ayant constaté que le salarié, chauffeur routier poids lourds, avait diffusé des insultes à l'égard du responsable d'exploitation sur son compte Facebook dont le profil était public et avait pris des photographies, les avait postées sur son compte Facebook et avait répondu à des commentaires tout en roulant sur une route enneigée, un tel comportement manifestant une grave imprudence de sa part alors qu'il aurait dû faire preuve d'une particulière vigilance par un tel temps, la cour d'appel a pu en déduire que ces manquements rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et justifiaient son licenciement pour faute grave ».

 

L’analyse de la FNTR

 

La décision est intéressante même si elle est difficilement lisible pour des non-initiés.

 

Le premier intérêt est le suivant : rappeler la séparation très nette qui doit exister entre le temps de repos et le temps de travail effectif lié à l’activité même de conduite du véhicule. Le temps de repos ne peut pas être utilisé pour solliciter le salarié, sauf motif impérieux ressemblant à une situation contraignante ou un cas de force majeure (d’interprétation donc très stricte).


L’employeur ne pouvait en conséquence pas sanctionner un salarié désireux de voir son temps de repos être respecté.

 

Le second intérêt peut être évoqué comme suit : réaffirmer la nécessaire diligence incombant au salarié dans l’exercice de son activité, notamment lorsqu’elle celle-ci présente par nature un degré de dangerosité particulier.


Le conducteur se voit reprocher plusieurs comportements manifestement incompatibles avec l’activité de conduite et l’indispensable attention que doit en résulter.


La Haute Juridiction estime que ce comportement caractérise une «grave imprudence» et utilise l’existence d’intempéries comme une circonstance aggravante pour le salarié (la route était enneigée et le salarié «aurait dû faire preuve d'une particulière vigilance par un tel temps».

 

La référence à l’existence d’insultes trouvées sur le compte public de Facebook est moins sujet à discussions : les insultes proférées ne semblaient pas contestées et le caractère public de la page Facebook concernée permet d’éviter le débat sur la possibilité d’utiliser des éléments relevant de la vie personnelle du salarié (bien que le droit du travail ait évolué).

 

En définitive, la décision de la Cour de cassation, très orthodoxe sur le plan juridique concernant les deux points évoqués, mérite l’attention car ceux-ci renvoient aux notions essentielles de santé et de sécurité.




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