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Jurisprudence : un employeur ne peut pas sanctionner un salarié refusant d’effectuer un travail ne relevant pas de sa qualification
Pour tout employeur, la qualification conventionnelle est un élément clé, puisqu'elle détermine notamment le minimum conventionnel qu'il devra appliquer au salarié. Mais cette classification lui permet également de savoir quelles tâches il pourra demander à l'intéressé. Une considération qui n'est pas anecdotique, comme le montre un arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 2020.
Les circonstances du litige
Une salariée, opératrice mini-laboratoire, exerçait au sein d'une entreprise de photographie. A rejeté la demande de la salariée. Ils relèvent que, dans le cadre de la filière magasin prévue par la convention collective de la photographie, la salariée peut, en application de sa classification, réaliser « les photos d'identités à l'exception des autres prises de vue ». Les juges relèvent également qu'à son contrat de travail, il est prévu que, de manière générale, celle-ci doit effectuer toutes les tâches confiées par la direction.
Or, suite à son licenciement pour faute grave pour avoir « refusé d'effectuer des prises de vue simple », elle avait saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes d'indemnités de rupture.
La salariée estimait ne pas avoir commis de faute, dans la mesure où les tâches qu'elle avait refusé d'effectuer ne lui incombaient pas en vertu de son contrat de travail et n'entraient pas dans les attributions attachées à sa qualification professionnelle.
La solution de la Cour d’appel
Les juges ont rejeté les demandes de la salariée. Ils ont relevé que l’employeur avait informé la salariée qu'elle serait amenée, à son retour de congé, à effectuer des prises de vues, tant en intérieur qu'en extérieur. Pour les juges, il s'agissait d'une évolution des tâches confiées et non d'une modification de son contrat de travail. L'arrêt a ajouté que la salariée étant titulaire du brevet de technicien supérieur de photographie, il est de sa compétence d'effectuer des prises de vue simples.
Les juges ont conclu leur raisonnement en estimant que, compte tenu des capacités de la salariée, l'employeur pouvait lui demander de réaliser de tels travaux à titre accessoire à sa fonction principale. Cette demande ne constituait pas une modification de son contrat de travail, de sorte que le refus de l'intéressée d'effectuer ce travail constituait un acte d'insubordination.u regard de la convention collective applicable, à savoir la convention collective de la photographie, elle avait le statut d'opérateur vendeur 3e niveau coefficient
La solution de la Cour de cassation
La Cour de cassation n'a pas suivi les juges du fond. Elle a commencé par rappeler un principe bien établi : le refus par un salarié d'effectuer une tâche ne correspondant pas à sa qualification n'est pas fautif.
Puis la Cour a repris les termes de la convention collective de la photographie, qui indique :
« pour la filière magasin (hors prises de vue), un opérateur vendeur 3e niveau coefficient 175 réalise les photos d'identité, à l'exception des autres prises de vue ;
pour la filière photographie professionnelle, un assistant 1er niveau coefficient 155 exécute les identités et les prises de vue simples sans composition sous contrôle hiérarchique, tandis qu'un photographe qualifié 3e niveau coefficient 175 réalise en plus, de manière autonome, des prises de vue sociales et des prises de vue techniques d'entreprise. »
Or les juges du fond avaient constaté que les prises de vue simples que la salariée avait refusé de réaliser ne relevaient pas de sa qualification professionnelle d'opérateur vendeur filière magasin, mais de celle de la photographie professionnelle. Par conséquent, la salariée était en droit de refuser d'exécuter cette nouvelle tâche, et ne pouvait donc pas être sanctionnée pour ce refus. Bien
La position de la FNTR
La solution de la Haute Juridiction ne doit pas surprendre : elle est logique et s’inscrit dans une jurisprudence constante en la matière. L’idée est que la polyvalence, pour légitime qu’elle soit, ne peut en aucun cas autoriser le contournement du régime de la modification du contrat de travail. Or la qualification d’un salarié constitue un élément essentiel du contrat de travail qui ne peut en aucun cas être modifié sans son accord.
En outre, il importe de s’en tenir aux qualifications déterminées par la convention collective applicable (il faut rappeler qu’en ce qui concerne les classifications, l’accord de branche prévaut sur l’accord d’entreprise). L’analyse de la Cour de cassation, qui s’appuie largement sur les dispositions conventionnelles applicables, rappelle l’importance pour les différents secteurs d’activités de disposer de classifications modernisées et cohérentes.
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