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Pourvu qu’il n’y ait pas la guerre
Il y a quelques années, à l’occasion de l’anniversaire du débarquement, nous avions publié un édito qui s’intitulait « La clé de toute victoire » où on rappelait le rôle clé de la logistique, que cela soit en temps de guerre ou en temps de paix.
Plus récemment, c’est l’École de Guerre Économique (EGE) qui a publié un rapport « Alerte sur la logistique. La France en panne de stratégie ». Une trentaine de pages, plusieurs questions cinglantes et le constat est cruel.
« Délaissant les acteurs français sur les axes maritimes, ferroviaires et routiers, la France s’est rendue dépendante des autres pays européens et de la Chine. Malgré les plans gouvernementaux successifs, le triple enjeu logistique du développement économique, de la souveraineté et de la résilience n’est pas suffisamment compris. Les professionnels du secteur, conscients des vulnérabilités, font des propositions concrètes qui peinent à être entendues. Sans un réveil logistique français, les champions internationaux s’empareront de l’ensemble du marché national. Dans un contexte de guerre économique permanente et d’une recrudescence des conflits militaires, l’élaboration d’une stratégie logistique globale est indispensable pour éviter les perturbations dans le fonctionnement du pays et ses conséquences pour la population. ».1.
Il a de soi qu’au-delà de sa publication, nous avons immédiatement entamé un dialogue avec les auteurs du rapport. Oui les transporteurs français ont été abandonnés, oui, les ports ne sont pas compétitifs, oui le ferroviaire est à la traîne.
Un grand pays est d’abord un grand pays de transport. Qui a une vraie politique globale et intégrée sur un temps long.
En France, en parlant avec des personnalités politiques, on découvre qu’ils connaissent le transport de personnes, mais quasiment rien aux transports de marchandises. Le Ministère dédié est sous la tutelle du Ministère de la Transition écologique. Chaque mode est traité en silo sans voir comment travailler de concert.
Et puis franchement, on a mieux à faire que d’avoir de la stratégie. On s’occupe de faire des réglementations sur des autocollants « angle mort » à coller où on peut sur les camions, à construire des ombrières sur des parkings si on n’a pas d’arbres à « canopée large ». On s’occupe aussi de faire des taxes kilométriques pour les étrangers et pour les Français aussi parce qu’on ne peut pas avoir deux régimes différents. Et comme les étrangers sont moins chers, une taxe de plus, ce n’est pas ça qui fera la différence. Sinon, il faudra aussi supprimer la ristourne gazole, officiellement pour la transition énergétique, officieusement parce qu’on n’a plus un rond et qu’on gratte les fonds de tiroirs.
Alors quand on prend des mesures aussi sérieuses, pourquoi voudriez-vous que l’on essaie de voir le transport et la logistique comme un levier de souveraineté économique, de puissance et d’indépendance ?
Quand on aura toujours autant de camions sur les routes mais avec des plaques d’ailleurs en Europe, quand il faudra toujours des années et un parcours du combattant infernal pour construire un entrepôt pas trop loin (si possible) des lieux de livraison, quand on aura toujours des grèves dans les ports au point que les bateaux continueront de préférer Anvers ou Rotterdam, quand on aura toujours des dysfonctionnements d’organisation et une absence évidente de complémentarité avec le ferroviaire, alors il ne faudra pas venir se plaindre.
Franchement, il ne manquerait plus qu’il y ait la guerre. On se rendrait compte (à nos dépens) à quel point la France a tout simplement raté le coche en matière de transport et de logistique. Ce rapport ne peut pas rester sans suite…
Nous y veillerons.
Florence Berthelot
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