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Jurisprudence : vigilance nécessaire de l’entreprise en matière de délai applicable en cas de licenciement pour faute grave d’un salarié
Dans un arrêt du 20 mars 2024, la Cour de cassation rappelle que l’entreprise, lorsqu’elle décide de licencier un salarié pour faute grave, doit le faire par principe dans un délai restreint. Dans le cas contraire, la faute grave ne sera pas retenue par les juges.
1/ Rappel du cadre juridique applicable
En matière disciplinaire, l’article L1332-2 du Code du travail impose à l’employeur un délai d’un mois après le jour fixé pour l’entretien pour notifier la sanction.
Ce principe ne signifie cependant pas que, de manière systématique, l’employeur dispose d’un mois pour sanctionner le salarié. En cas de licenciement pour faute grave, il faut agir plus vite si les circonstances le permettent.
Il est de jurisprudence constante que l’employeur qui reproche à un salarié une faute grave doit agir dans un délai restreint lorsqu’aucune enquête interne n’est nécessaire. Celle-ci est parfois jugée indispensable en cas de faits particulièrement complexes (harcèlement moral, discrimination, violences réciproques…) qui impliquent que soient menées des recherches destinées à permettre des éclaircissements sur les faits et en avoir ainsi une parfaite connaissance (ce qui doit ensuite permettre à l’employeur de prendre la sanction appropriée).
La durée de ce délai «restreint» n’étant ni définie par la loi ni par la jurisprudence, elle est analysée au cas par cas par les juges qui peuvent, si l’employeur a tardé à agir, juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave.
2/ Les circonstances du litige
En l’espèce, un salarié qui occupait le poste de cariste avait provoqué un accident le 1er mars 2019 et avait été placé en arrêt de travail le 22 mars 2019 après un accident du travail.
Le salarié avait ensuite été convoqué le 26 mars 2019 à un entretien préalable et fait l’objet d’un licenciement pour faute grave le 6 mai 2019 en lien avec l’accident provoqué le 1er mars 2019.
Il a alors saisi la juridiction prud’homale pour contester son licenciement.
3/ La position des juges
La Cour d’appel a considéré que la faute grave n’était pas caractérisée, au motif qu’un délai important s’était écoulé entre l’accident pour lequel le salarié avait été licencié et la convocation à entretien préalable, et avait donc jugé le licenciement nul (puisque le salarié était en arrêt de travail consécutif à un accident du travail).
En d’autres termes, les juges du fond ont invalidé le licenciement disciplinaire au motif que le délai de 25 jours entre les faits et la mise en œuvre de la procédure de licenciement ôtait tout caractère de gravité à la faute.
Saisie, la Cour de cassation a validé la position de la Cour d’appel et a rejeté le pourvoi de l’employeur.
La Haute Juridiction a relevé que la Cour d’appel avait constaté deux points :
- d’une part, que l’employeur n’avait pas suspendu le salarié de la conduite des chariots élévateurs après l’accident du 1er mars 2019, ce qui démontrait qu’il ne considérait pas le salarié impropre à la conduite,
- d’autre part, que l’employeur avait eu connaissance des faits le jour de l’accident, soit le 1er mars 2019, et qu’aucune circonstance particulière ne justifiait le délai compris entre la révélation des faits et la convocation du salarié à l’entretien préalable.
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